En tant que freelance, une question fiscale arrive très vite sur la table : vos revenus sont-ils des Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC) ou des Bénéfices Non Commerciaux (BNC) ? Ce choix n’est pas anodin, car il détermine votre régime d'imposition, vos plafonds de chiffre d'affaires et même le montant de vos charges. Alors, comment savoir dans quelle catégorie classer votre activité pour ne pas faire d’erreur ? On vous explique tout.
A retenir :
La catégorie BIC regroupe les revenus des professions commerciales, industrielles ou artisanales exercées en indépendant. Elle couvre donc toutes les activités qui ont un côté commercial ou artisanal.
On parle de critère commercial quand votre activité joue sur l'achat et la revente de biens, de matériel ou de main-d'œuvre, ou si vous servez d'intermédiaire. L'organisation de moyens matériels et humains importants est un bon indicateur.
Pour les prestations de services, les BIC comprennent par exemple les agents commerciaux, les courtiers, la location de matériel, l'achat-revente de services comme l'hébergement web, ou encore les services à la personne qui demandent beaucoup de matériel. La location meublée (LMNP ou LMP) est aussi une activité BIC par nature, car elle associe un service d'hébergement à la fourniture de meubles.
Les BNC sont les bénéfices des professions libérales, des charges et offices, et de toute activité lucrative qui ne rentre pas dans une autre catégorie de revenus. Cette définition assez large en fait la catégorie par défaut pour beaucoup d'activités.
Ici, c'est le travail intellectuel qui prime. Votre activité est basée sur vos connaissances ou votre talent personnel, et votre expertise compte plus que le matériel que vous utilisez.
Les prestations de services en BNC incluent les consultants, les développeurs, les graphistes, les rédacteurs, les formateurs indépendants, les architectes ou les avocats. Ces métiers sont définis par le savoir-faire et l'expertise de la personne. En somme, c'est la catégorie par défaut pour les services qui n'ont pas de caractère commercial évident. En cas de doute, on penche plutôt pour les BNC.
Le critère fondamental : la nature de votre activité vous est imposée
Le point le plus important est que vous ne choisissez pas votre catégorie entre BIC et BNC. C'est la nature même de votre activité qui la détermine automatiquement, peu importe ce que vous préférez. La différence se joue entre une activité surtout intellectuelle (BNC) et une activité qui utilise beaucoup de matériel avec un but commercial (BIC). Vous devez analyser cela de manière objective.
Une activité peut passer de BNC à BIC si la fourniture de matériel, de marchandises ou l'organisation de moyens devient plus importante que la prestation elle-même. Ce changement peut même arriver en cours de route.
Quel régime fiscal et social pour votre activité de service ?
Le régime micro-BIC s'applique si votre chiffre d'affaires annuel est inférieur à 77 700 €. Ce régime est simple à gérer avec des obligations comptables légères. Il vous donne droit à un abattement pour frais professionnels de 50 % sur votre chiffre d'affaires, censé couvrir toutes vos charges sans avoir à les justifier.
Si vous dépassez ce seuil de 77 700 € ou si vous le choisissez, vous passez au régime réel (simplifié ou normal selon votre chiffre d'affaires). Avec ce régime, vous déduisez vos charges réelles, ce qui demande une comptabilité plus stricte. Vos cotisations sociales sont calculées sur votre chiffre d'affaires après l'abattement de 50 % en micro-BIC, ou sur votre bénéfice si vous êtes au régime réel.
Le régime micro-BNC s'applique si votre chiffre d'affaires annuel est inférieur à 77 700 €. Il offre une gestion simple, comme le micro-BIC. L'abattement pour frais professionnels est de 34 % sur votre chiffre d'affaires, un taux moins élevé que pour les BIC. Cette différence vient du fait qu'on estime que les activités BNC demandent moins de capital.
Si vous dépassez le seuil ou sur option, vous passez au régime de la déclaration contrôlée, l'équivalent du régime réel pour les BNC. Vous déduisez alors vos frais professionnels pour leur montant réel, ce qui exige une comptabilité précise. Vos cotisations sociales sont calculées sur le chiffre d'affaires après l'abattement de 34 % en micro-BNC, ou sur votre bénéfice en déclaration contrôlée.
Comment savoir si le régime réel est plus intéressant ?
Le régime réel (BIC) ou la déclaration contrôlée (BNC) est plus intéressant pour vous si le total de vos charges réelles dépasse l'abattement forfaitaire. Pour le savoir, il faut faire le calcul.
Concrètement, vous devez comptabiliser tous vos frais réels : achats de matériel, logiciels, loyer, assurances, mutuelle, retraite, frais de déplacement, formations, sous-traitance et toutes les dépenses liées à votre activité. Ensuite, comparez ce total à 50 % de votre chiffre d'affaires (pour les BIC) ou à 34 % (pour les BNC). Si vos charges sont plus élevées, opter pour le régime réel est une bonne idée.
Attention toutefois : n'oubliez pas que le régime réel signifie plus de paperasse, comme tenir une comptabilité complète avec un bilan et un compte de résultat. Pensez à cette charge de travail supplémentaire avant de choisir.
Comment déterminer votre catégorie en pratique ?
Commencez par faire la liste complète de toutes vos missions pour vos clients, en détaillant bien chaque partie de votre service. Soyez le plus précis possible pour ne rien oublier.
La question clé est la suivante : est-ce que vous vendez surtout votre expertise et votre temps (typique des BNC), ou est-ce que vous organisez des moyens matériels et humains pour fournir un service (typique des BIC) ? C'est le cœur de l'analyse.
Observez aussi la part que représente le matériel dans votre prestation. Par exemple, un photographe qui vend des tirages et des albums chers, représentant une part importante du prix, pourrait avoir une activité commerciale.
Votre code APE (ou NAF), reçu à la création de votre entreprise, donne une première idée de la nature de votre activité. Attention toutefois : ce code n'a pas de valeur légale pour les impôts et n'est pas toujours adapté à votre situation.
La référence absolue est le Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFiP-Impôts), qui détaille la position officielle de l'administration fiscale et fait autorité. Les sites de l'URSSAF, des Chambres de Commerce et d'Industrie (CCI) ou des Chambres de Métiers et de l'Artisanat (CMA) proposent aussi des guides pratiques pour aider les entrepreneurs.
Si vous avez encore un doute, le plus sûr est de vous tourner vers les bons interlocuteurs. Vous pouvez poser la question par écrit à votre Service des Impôts des Entreprises (SIE) pour obtenir une réponse formelle, appelée rescrit fiscal, qui vous couvrira en cas de contrôle.
Il est aussi recommandé de faire appel à un expert-comptable, votre meilleur partenaire pour analyser votre situation et vous aider à faire le bon choix. Enfin, vous pouvez vous adresser au Centre de Formalités des Entreprises (CFE) qui gère votre dossier, à savoir l'URSSAF pour les BNC, et la CCI ou la CMA pour les BIC.
Les cas particuliers et les risques à connaître
Vous pouvez tout à fait avoir deux activités de natures différentes en même temps. Par exemple, un consultant (BNC) peut aussi avoir une activité d'achat-revente de matériel informatique (BIC).
Dans ce cas, plusieurs règles s’imposent. Vous devez obligatoirement avoir deux comptabilités séparées pour bien distinguer les revenus de chaque activité. Si vous êtes en micro-entreprise, vous devez respecter les deux plafonds de chiffre d'affaires : 77 700 € pour les services et 188 700 € pour la vente, sans que le total ne dépasse 188 700 €. Chaque revenu est imposé avec ses propres règles, notamment un abattement de 50 % sur la partie BIC et de 34 % sur la partie BNC.
Les nouveaux métiers du numérique comme community manager, influenceur ou créateur de contenu sont souvent dans une zone un peu floue et demandent une analyse au cas par cas. Ils mélangent souvent plusieurs sources de revenus.
En général, la justice considère que la création de contenu, la gestion de réseaux sociaux et le conseil en ligne sont des activités BNC, car elles reposent sur l'expertise et la créativité. En revanche, les revenus de la vente de produits dérivés, du dropshipping ou de la publicité (affiliation) sont plutôt vus comme des BIC, ces activités ayant un caractère commercial clair.
Pour ces métiers, il faut analyser chaque source de revenu séparément pour savoir comment la classer fiscalement.
Une erreur de qualification vous expose à des risques significatifs. Le principal est un redressement de l'administration fiscale et de l'URSSAF, qui peuvent mener un contrôle ensemble. Cela peut aussi entraîner un recalcul de vos impôts et cotisations sur plusieurs années, avec des pénalités de retard dont l'impact financier peut être très lourd.
Notre conseil : si vous vous rendez compte que vous avez fait une erreur, il est essentiel de réagir vite. Contactez votre Service des Impôts des Entreprises et votre URSSAF pour régulariser la situation avant un contrôle. Cela limitera les pénalités.
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